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Ils sont heureux! Certes un peu chahutés pour certains d’entre eux par ce mal de mer qu’il y a quelques semaines encore,

ils n’auraient jamais imaginé éprouver. Jamais osé imaginer. Mais émus jusqu’au plus profond d’eux-mêmes d’être en mer pour la première fois de leur vie, au large de leur pays l’Argentine à bord de ce Fleur de Passion comme tombé du ciel au beau milieu d’une existence qui fait peu de place à ce genre de fantaisie.

Ils sont sept « enfants des rues » de Buenos Aires - plus tellement enfants d’ailleurs puisqu’ils sont adolescents et jeunes adultes - et leur deux accompagnateurs, Omar et Martin - à avoir embarqué dimanche 1 octobre à Mar del Plata, à quelques heures de bus de Buenos Aires, pour une semaine de navigation jusqu’à Puerto Madryn et la péninsule Valdès, 500 miles plus au sud. Sept membres de la communauté de Ruca Hueney, un foyer situé en périphérie de la capitale argentine et qui, avec le soutien de l’association suisso-argentine Mate Cocido à Genève, apporte toit, santé et éducation à des dizaines d’enfants et d’adolescents laissés pour compte par le système ou leur famille. Une vraie famille, justement, que ce foyer où les plus petits apprennent à lire, à écrire, les mathématiques et les divisions « méthode française », et les plus grands l’anatomie animale aussi bien que l’expression artistique dispensée par une toute jeune prof que l’on croise traversant les champs pour venir donner son cours dans le bâtiment nouvellement construit. Lequel bâtiment tout blanc accueille, outre des salles de classe et une grande aula à la belle charpente en bois, une laiterie où sont fabriqués des fromages par une jeune Joanna toute fière de sa production. Car on travaille aussi, à Ruca. Aux champs sous la houlette d’éducateurs pour s’occuper du potager ou des vaches - ça c’est la responsabilité d’Ariel - qui produisent le lait pour les fromages, notamment. Une famille où les plus grands, devenus adultes, deviennent des éducateurs qui prennent le relais et s’occupent à leur tour des plus petits.

Ce petit détour par la campagne argentine à moins de deux heures de Buenos Aires pour dire combien ce projet d’embarquer sur Fleur de Passion, né à Genève, s’est imposé comme une évidence tant la fonction du voilier est d’être une passerelle entre les mondes, entre les continents et les gens, tant il a pour ambition d’offrir d’autres horizons en plus de voguer vers les siens.

Une dizaine de jours avant d’embarquer pour de bon, le groupe de Ruca était venu à bord alors que le voilier faisait escale au Yacht Club Argentino de Buenos Aires. Pour découvrir le bateau, faire connaissance avec l’équipage - Jorge le skipper argentin, Yffig et JJ - et humer déjà un peu les délices de cet air du large si proche et pourtant si lointain. Une excitation contenue se lisait dans leurs yeux alors qu’ils arpentaient le pont, les coeurs battant d’émotion résonnaient tandis que, progressivement, ils commençaient à s’approprier non plus un rêve mais une réalité bien tangible. Enfants des rues ils n’étaient plus, mais équipiers en devenir, qui participeraient bientôt à la manoeuvre, hisseraient les voiles, tiendraient un cap ou se lanceraient dans une partie d’échec quand l’heure serait venue de laisser son quart à d’autres. Le repas pris en commun autour de la grande table du carré avait eu la gaité spontanée de ces moments de rencontre et de partage que le bateau permet, espace d’accueil par nature quand il est au port. Il avait été l’occasion de discuter de tous ces aspects de la vie du bord de cette autre communauté que forme l’ensemble de l’équipage en navigation: veiller à l’entretien courant, préparer les repas, faire la vaisselle, etc. La vie ensemble, en mer comme à terre!

Alors en attendant plus amples nouvelles du bord de nos équipiers de Ruca, ces voeux de bonheur que nous leur adressons depuis Genève.

Et pour en savoir plus sur Mate Cocido: www.matecocido.org ou www.facebook.com/associationmatecocido1/