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En ce début mai 2019, nous nous trouvons au milieu de l’océan Atlantique sur la route qui monte en ligne droite du Cap Vert en direction des Açores. Depuis déjà une semaine et notre départ de Mindelo, nous ne sommes plus entourés que par du bleu. En date du 6 mai, nous nous trouvons à la position 29º21.40’N – 31º47.57’W. Après plusieurs jours accompagnés de vent et de vagues, il n’y a plus ce jour ni vent ni même courant. L’océan ressemble presque à un lac. Des conditions parfaites pour un échantillonnage dans le cadre du programme Micromégas en partenariat avec l’association Oceaneye à Genève. D’autant qu’à la surface, si l’on peut observer des accumulations d’algues de type Sargassum, nous pouvons constater aussi des plastiques qui flottent partout. Il semble que cette zone présente une accumulation particulièrement élevée de débris. Pour confirmer cela, il faudra toutefois attendre les résultats des analyses.

L’équipage se prépare donc à la séquence de prélèvement : Fleur de Passion ralentit sa vitesse à moins de 5 nœuds; le « mandat trawl" est préparé, son lock mis en place pour calculer la distance parcourue; la « chaussette » est fixée à l’extrémité du filet pour collecter les micro-plastiques; puis le manta est jeté à l’eau et traîné une demi-heure durant. Il ne s’agit pas d’un échantillon quelconque, mais bien du 200ème depuis que l’expédition a commencé. Tout un symbole! Nous remontons le filet et pouvons déjà y observer des plastiques de couleur qui n’ont hélas rien à voir avec de quelconques éléments organiques.

Nous procédons à un second échantillonnage - de 10 minutes cette fois - qui ne servira pas à l’analyse mais nous permet d’observer son contenu au moyen de la loupe binoculaire du bord: microplastiques et organismes planctoniques que l’on peut trouver dans cette zone. Anne Bory, la dessinatrice à bord, en profite pour dessiner les créatures planctoniques : des larves de poissons, des escargots violets, des crevettes bizarres et, aussi, les fameux micro-plastiques. 

La zone que nous traversons est identifiée comme une zone d’accumulation de débris, une des îles de plastiques qui existent dans l’Atlantique. Pendant la durée de la navigation dans cette aire, nous faisons plusieurs autres échantillonnages pour les regarder à la loupe. Ces observations (voir les photos) indiquent que la concentration de plastiques d’une taille entre 1mm et 5mm est très élevée. Ceux-ci se présentent avant tout sous forme de fibres de plastiques et de petits morceaux durs. Au final, l’ensemble des cinq échantillons réalisés au cours de cette traversée contiennent des micro-plastiques.

Depuis le début de l’expédition en avril 2015, plus de 90% des prélèvements effectués dans le cadre du programme Micromégas contenaient des particules micro ou méso-plastique « dans les dimensions analysées », comme le soulignent les biologistes d’Oceaneye. Pas étonnant en conséquence de continuer à trouver autant de débris au milieu de l’océan Atlantique à l’heure de la remontée vers les Açores puis Séville. Car les flux de production de plastique et donc de pollution, eux, n’ont pas franchement baissé depuis quatre ans et suivent au contraire des courbes ascendantes qui ont de quoi nous inquiéter.

La problématique de la pollution micro-plastiques en mer est connue et tend à être de plus en plus médiatisée. Malgré cela, sans de profonds changements dans nos habitudes, cette pollution va se poursuivre et empirer. Car chaque déchet de plastique qui finit dans les eaux aujourd’hui est voué à se fragmenter en micro particules puis en nano-particules qui jamais ne se dissolvent. Faisant peser un risque toujours plus grand pour la santé des océans. Et de la nôtre au final.