Livre de bord

Fleur de Passion a atteint l’île brésilienne dimanche 24 mai après onze jours de traversée depuis Praia au Cap-Vert marqués par des caprices météo plutôt éprouvant, un mouillage étonnant aux abords des îlots de Saint-Pierre et Paul, sans compter le passage de l’Equateur. A bord: Amélie, Audrée, Brigitte, Candy, Emma, Michel, Orlane, Pietro, Timothy et Aniello. Retour sur la traversée.

Praia, capitale du Cap-Vert, dans la nuit du mardi 12 au mercredi 13 mai. Ouf! Nous avons récupéré Aniello ce matin à 2h du matin à l’aéroport, où il vient d’arriver de Genève. Il sera notre cameraman-photographe pour cette transat. Au pied, levé il a rejoint le bord pour suivre l’expédition sans avoir jamais navigué! Il n’en a pas moins décidé de se « jeter à l’eau » pour vivre ce qui sera sans doute pour lui une expérience inoubliable… 

Mais pour l’heure, à quelques heures du départ vers le Brésil, place aux derniers préparatifs qui débutent ce mercredi 13 mai dès le réveil: formalités d’émigration, police maritime, dernières courses, etc.

Le départ est lancé, il est 17h, toutes les voiles sont hissées et après s’être éloigné du dévent de l’île, cap au Sud-Sud Ouest. Quelques news de Mike, du Laboratoire d’Applications bioacoustiques de l’Université polytechnique de Catalogne qui pilote le programme 20'000 sons sous les mers avec Michel André, nous rassurent: l’iridium fonctionne et on est en contact, même si la « flûte », le capteur acoustique tracté derrière Fleur de Passion, n’est pas encore 100% fonctionnelle. Comme prévu, chacun s’installe progressivement dans le rythme de la traversée, les journées sont réglées par les quarts avec des nuits forts belles. La météo est clémente. Il n’y a pas de lune, ce qui permet d’en profiter pleinement pour apprendre à repérer les différentes constellations.

Les bulletin météo pris à Praia nous annoncent du vent de NE pour le début puis une grande zone de calme autour de 10°N et 5° N, on part donc sur  l’optique de traverser la ZIC (zone intertropicale de convergence) entre 27°W et 29°W. Il faut que l’on se méfie de l’E-SE qui est annoncé une fois celle-ci passée ! Fleur de Passion ne pourra pas trop tirer un bord de près si l’on est trop à l’ouest !

Tout va bien jusqu’au dimanche 17 mai 19h, où le bateau entre dans un autre monde… Les nuages s’accumulent en début de nuit, quelques éclairs sont visibles au loin, le vent forcit du N force 4-5: pas tellement d’alternative que de tirer des bords de grand largue, et donc de quitter la route directe vers Fernando de Noronha. Décision est cependant prise d’affaler afin de voir ce qu’il va se passer durant les prochaines heures. Pietro a déjà essuyé des rafales tournantes dans ce coin-là, il sait à quoi s’en tenir ! La nuit file et au petit matin, premier grain et vent qui change de 180° plein Sud! Fleur de Passion se retrouve avec un vent de face force 5!!! Fernando est à 800milles à 195° cap vrai! Voilà qui ne présage rien de bon… Contre mauvaise fortune bon coeur, ce sont trois jours un peu âpres qui commencent, avec un courant de 2 noeuds vers le Nord qui nous freine dans notre progression, et toujours ce vent du Sud qui ne veut pas nous lâcher. Qu’ils seront longs ces 3 jours… Chacun se réfugie à sa manière dans son monde pour gérer la fatigue accumulée.

Enfin, jeudi 21 au matin, nous faisons escale aux îlots de Saint-Pierre et Paul. Quelques cailloux plantés au milieu de nulle part à quelque 860 miles (1600 km) du Cap-Vert et 510 miles (950 km) de Natal sur la côte brésilienne avec, tenez-vous bien, quatre gars qui s’y trouvent en mission pour 45 jours: deux militaires et deux biologistes plus un bateau de pêcheurs que nous avons aperçu de loin dans les premières lueurs du jour occupent les lieux. On s’organise pour s’amarrer à la bouée, faire connaissance et du troc ! Poissons contre chocolat suisse et vin rouge espagnol. Tout le monde y trouve son compte…

Dans les eaux cristallines entourant ces rochers qui forment la partie émergée des crêtes de la dorsale médio-atlantique et appartiennent à l’Etat brésilien du Pernambouc, des poissons par centaines, une tortue marine qui traîne dans le coin et même des raies mantas qui viennent saluer Fleur de Passion et sa petite équipe à trois mètres de la coque.

Après quelques heures à peine dans cet endroit hors de tout, nous repartons pour espérer passer l’équateur cette nuit à minuit! Hormis pour le skipper, une première pour les neuf autres personnes du bord. On fêtera cela au champagne comme il y a trois jours la moitié du parcours, une bouteille gentiment offerte par Audrée à tout l’équipage !

L’arrivée à Fernando le 25 mai a permis à chacun de profiter de quelques jours de repos bien mérité! Avant de reprendre la mer pour atteindre Salvador de Bahia vers le 2 juin.