Livre de bord

Depuis Manado en Indonésie fin novembre, c’est un nouvel équipage qui a pris le relais pour conduire l’expédition aux Philippines, à Cebu précisément, où le voilier est arrivé entre temps. En direction de Palaos, très à l’est de l’île philippines de Mindanao pour en éviter les désagréments, ce fut l’absence de vent qui mit l’équipage à rude épreuve…
Jeudi 23/11/2017
Port de Manado sur l’île de Sulawesi, Indonésie
Nous venons de débarquer l’équipage précédent après 2 jours passés ensemble à bord de Fleur.
C’est toujours un moment important, la passation d’équipage: c’est le moment où les marins se racontent les aventures passées à bord mais aussi partagent les nouvelles du pays pour ceux qui ne sont pas rentrés depuis quelques mois. On se questionne, on s’écoute et on fini par trinquer à l’aventure qui nous lie et au bateau qui nous emmène toujours plus loin.
C’est aussi le moment très important de faire le point technique sur l’état du bateau, du matériel scientifique embarqué, des modifications dans les procédures mais aussi de faire le changement administratif d’équipage vis à vis des autorités locales. 
Ce jour-là à Manado, il n’aura fallu que quelques minutes pour régulariser la nouvelle crew-list, chose suffisamment rare pour être relevée! Les dernières accolades sur le quai et déjà, les amarres disparaissent derrières les écubiers de pont. Un nouveau départ, direction Bitung, de l’autre côté de cette extrémité que forme l’île, dernière escale en Indonésie avant de mettre le cap sur les Philippines.

Vendredi 24/11/2017
Port de Bitung, 5h00 du matin. Les nouveaux équipiers et jeune arrivés à bord sont encore en train de dormir et d’absorber leur décalage horaire. Seule Manon est présente au petit déjeuner des marins qui préparent tôt le marathon de la journée. Il faut dire que Manon est rodée sur le rythme du bord, elle a embarqué le 16 septembre à Rabaul, en Papouasie-Nouvelle Guinée.
Il s’agit de ne pas trainer. C’est la veille d’un grand départ, celui qui nous emmènera vers les Philippines après une escale prévue en République de Palau, une île en plein milieu de la Micronésie, à 600 milles à l’est des côtes philippines.
Au programme, préparation du bateau pour prendre le large, avitaillement en nourriture, paperasseries. Les groupes se forment pour le supermarché, le marché local, la station essence pour le gaz de la cuisinière et le carburant du zodiac. Pour Sébastien, ce sera les méandres des couloirs des bâtiments de l’immigration, des douanes et du « harbour master ».
A la nuit tombée tout le monde se retrouve et on se raconte les anecdotes de la journée! La paperasserie a été laborieuse pour la sortie d’Indonésie. L’immigration rechignait pour une histoire de visa et les douanes se sont réellement demandées si nous n’avions pas changé de moteur pendant notre séjour en Indonésie à cause d’une histoire de numéro d’identification. Comme si nous avions eu l’intention de nous débarrasser de notre bon vieux moteur Baudouin made in France, quand même!
Finalement, après des heures de discussions et beaucoup de patience et de diplomatie, tout finit par rentrer dans l’ordre.

Samedi 25/11/2017 au vendredi 01/12/2017
Encore quelques ajustements technique à faire à bord, puis c’est enfin le départ! La route prévue par le capitaine nous emmène d’abord plein Est, le long des côtes indonésiennes puis route au Nord-Est de manière à passer très au large l’ile de Mindanao (Philippines) où la piraterie côtière est très active tout comme dans la mer de Sulu plus à l’ouest. Mieux vaut être tranquille au large dans la mer des Philippines!
Une escale en République indépendante de Palau, sur l’île de Palaos est prévue à mi chemin entre Bitung et Cebu. Cette île fait partie de l’archipel des îles Carolines. Elle a une réputation mondiale pour ses fonds marins et ses eaux turquoise, cela pourrait être l’occasion de continuer le programme CoralWatch sur l’état des coraux. Mais aussi d’offrir à l’équipage un repos bien mérité.
Si les dépressions tropicales ne sont pas à craindre aussi proche de l’équateur, c’est le peu de vent qui va mettre l’équipage à rude épreuve! Houle de NE, la fameuse houle perpétuelle du Pacifique, et ce que dans le jargon du bord on appelle le Pot au noir. En effet, au voisinage de l’équateur, la force de Coriolis est nulle et les formations dépressionnaires très rares, tout comme les cyclones qui ne peuvent pas s’y développer.
Les voiles sont hautes et dansent sur le rythme de la houle, les poulies grincent, les marins invoquent Eole et scrutent l’horizon à la recherche du moindre souffle, du petit grain salvateur.  Chez les équipiers, c’est pour certains une lutte contre le mal de mer qui commence. Continuer de s’hydrater et de manger même lorsque la seule envie qu’on a dans ses moments là, c’est de s’endormir pour que ça passe…
Au rythme des manœuvres fréquentes de voiles pour exploiter le moindre souffle, il faut cuisiner, ranger, faire les quarts. Presque à mi chemin de Palaos, Sébastien le skipper nous annonce une petite surprise. Sur notre route, une île, comme une tâche de bleu azur au milieu de l’Océan Pacifique.
C’est au 4ème jour que l’on entend un cri qui provient du pont : « Terre en vue ! » Il y en a toujours un qui la voit avant les autres, comme ça, alors qu’il est en train de barrer, de manger ou de se promener sur le pont… Quelques heures plus tard, c’est avec beaucoup de prudence et d’émotions que nous approchons de cet îlot perdu au milieu de l’Océan.
Une belle après midi de détente en deux groupes qui se relayent, l’un en exploration subaquatique et terrestre et l’autre en mode veille à bord de Fleur, telle une monture en train de se reposer dans un champ bleu azur, sous le vent de l’île, dans les eaux calmes, à la dérive, le mouillage étant rendu impossible par les eaux profondes.
Après une belle journée, nous reprenons la mer, laissant derrière nous ce petit havre de paix où, paraît il, un homme habite seul. Quelques hissages, bordages et tentatives de route à la voile plus loin, nous arrivons enfin à Palaos, 7° de latitude Nord, au petit matin du 01 décembre, 35°C et petit chenal taillé dans les eaux turquoise en guise de bienvenue.
L’escale de Fleur de Passion à Manado, dans le nord de l’île de Sulawesi, n’est pas passée inaperçue. L’équipage a eu les honneurs d’un accueil traditionnel avec force danses et costumes traditionnels. A l’invitation de la consul honoraire de Suisse venue spécialement de Makassar, tout au sud de l’île, ce sont ensuite des élèves de classes de la ville ainsi que les autorités locales qui ont été conviés à bord pour une visite du voilier et une découverte des différentes facettes de The Ocean Mapping Expedition. Le point d’orgue de deux mois à bord pour l’équipage sortant, qui a passé le relai à une nouvelle équipe chargée de conduite le bateau jusqu’aux Philippines. Dernier carnet de bord.
Position: Port de Likupang, 1°41.51'N 125°00.94’E
« Dernière étape pour l'équipage qui a conduit le bateau de Papouasie-Nouvelle Guinée en Indonésie. Nous appareillons au matin de Tidore pour rejoindre les îles de Sulawesi. Un petit vent du Nord nous permet de hisser les voiles et de faire un départ en douceur. Très rapidement, cependant, le courant nous entraîne au Sud, le vent faiblit et nous sommes dans l'obligation de nous appuyer avec le moteur. La traversée durera 36 heures et nous arrivons à Bitung, tout au nord de Sulawesi, dans l'après midi après une nuit magnifique en mer.
Nous sommes accueillis par les Coast Guard (pour la première fois!) et ceux-ci nous recommandent un joli mouillage dans le détroit de Lembe, haut lieux de la plongée macro! L'équipage profite d'une belle fin de journée pour aller observer des êtres étranges, en snorkelling comme en plongée. Ludo notre divemaster fait de splendides photos de nudibranches et de poissons scorpions.
Nous nous arrêterons aussi à Manado capitale de la province afin d'informer les autorités portuaires de notre présence dans la région et faire quelques courses de produits frais. Le 17 novembre, nous partons pour les îles de Bunaken et Siladen afin de plonger dans ces hauts lieux de diversité marine. Nous en serons empêchés par l'impossibilité de mouiller l'ancrer de Fleur de Passion. La raison en est simple: le corail à fleur d'eau plonge directement dans des abysses vertigineux! A 50 m de la rive, le sondeur indique déjà plus de 200 mètres de fond!!!
Nous partons dès lors au large pour une nuit à la dérive avant l'arrivée de grains orageux qui nous pousseront avec la seule trinquette hissée à plus de 6 noeuds vers le Nord. Un petit mouillage avant de rejoindre Kima Bajo, une anse ou nous devons accueillir la consul honoraire de Suisse à Sulawesi et ses invités locaux. Le rendez-vous est déplacé et nous partons le 19 au matin à l'aube pour rejoindre le Port de Likupang Munte où les festivités d'accueil sont organisées pour le 21 au matin.
Deux jours de repos bien mérités pour tous. Tam, Tim et Manon s’accordent 3 jours de « vacances », ils exploreront la région en mode backpacker! Entre deux, Kader (le nouvel éducateur) et Jonas, un troisième ado du programme Jeunes en mer nous rejoignent. Le 21 au matin, la fête est belle, des danseurs et chanteuses apportent de la couleur parmi les officiels de la région. Ambiance sympathique, accueil chaleureux, merci à Julia, la consul et à son staff.
Le 23 novembre, le nouvel équipage - Sébastien, Amélie, Camille et Stephen - nous rejoint plein d'énergie! Nous par contre sommes un peu fatigués après ce bel épisode de deux mois dans cette région équatoriale magnifique mais tellement chaude et humide... Tout de bon à l'équipe qui part pour les Philippines! »

Entre splendeurs naturelles de Raja Ampat d’un côté et monceaux de plastiques flottant en certains endroits de l’autre, les navigations dans cet extrême est de l’Indonésie offrent un contraste saisissant.

Départ de la baie de Cenderawasih et ses requins baleines le 16 octobre pour une belle nuit de navigation avec une pointe à 9,56 noeuds pour JJ en direction de Manokwari où nous ferons une halte rapide pour acheter des produits frais. La baie où mouille Fleur de Passion est pleine de déchets plastiques flottant et pourtant, des pêcheurs s'activent ça et là. Nous appareillons le lendemain en début d'après-midi, direction Sorong!

Fleur de Passion arrive à 1h du matin dans la baie de cette petite bourgade indonésienne, le vendredi 20 octobre. Aurélie la musicienne-compositrice et Zacharie le passager nous quittent l'après-midi même, chacun allant continuer son aventure indonésienne à terre pour quelques jours ou quelques semaines. Puis nous accueillons nos nouvelles passagères, Florence et Laure, Alex le nouveau dessinateur et Gabriel notre cameramen « suissaustralien ».

Nous appareillons le 22 octobre après la routine d'escale, c'est-à-dire les formalités administratives avec le « harbour master », les courses, les lessive… Et nous mettons le cap toutes voiles dehors sur Kri Island, située à 42 miles au nord-ouest de Sorong. Malheureusement, la vent ne suivra pas et la route se terminera au moteur. Nous trouvons difficilement un mouillage avec 40 mètres de profondeur et restons là durant deux nuits.

Arborek 24-25 octobre 2017

15h, départ Arborek toutes voiles dehors de nouveau en direction de Wayag Islands. Pour éviter d'arriver de nuit à notre prochaine étape, nous naviguons toute la nuit à 3 noeuds de moyenne. Le 26 octobre à 06h50, nous franchissons l'équateur ! Nous revoilà dans notre hémisphère nord mais il fait toujours aussi chaud…

Wayag 26-30 octobre 2017

Arrivée dans l'archipel de Wayag en début d'après-midi. Toutes nos cartes sont fausses et manquent terriblement de détails, et nous entrons donc à vue dans le dédale des îles, « à l’ancienne ». Un yacht (de luxe) est amarré sur un superbe spot, ancre à l'avant, accroché à la terre derrière. Il lèvera l’ancre une heure plus tard et nous en profiterons pour aller mouiller à sa place, amarré comme lui. De là, différentes explorations de l'archipel s'organisent en zodiac. Pour plusieurs personnes à bord, il s'agit tout simplement du plus beau paysage découvert en voyage.