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The Ocean Mapping Expedition dévoile  de nouvelles données scientifiques sans précédent sur le rôle des océans dans le cycle du carbone, collectées entre Le Cap et Dakar, où elle est arrivée le 28 mars au terme de quatre semaines de remontée de l’Atlantique Sud.

Le programme Winds of Change de monitoring des gaz à effet de serre à la surface des océans, en partenariat avec l’Université de Genève, révèle des concentrations étonnamment basses de méthane et de dioxyde de carbone à la surface de l’Atlantique Sud après des observations similaires dans l’océan Indien et alors que les océans sont supposés en être des émetteurs.

« Les données collectées par The Ocean Mapping Expedition entre Le Cape et Dakar du 28 février au 28 mars 2019 révèlent des concentrations étonnement basses de méthane et de dioxyde de carbone à la surface de l’Atlantique Sud », explique le Prof Daniel McGinnis, chef du Groupe de Physique aquatique à la Faculté des Sciences de l’Université de Genève et responsable du programme The Winds of Change avec sa collègue le Dr Daphne Donis.

« Ces concentrations basses de CH4 et de CO2 pourraient refléter le fait que Fleur de Passion a navigué très au large des côtes d’Afrique australe et de sources terrestres de tels gaz », poursuit le chercheur. Bien que la région soit considérée comme un une source de dioxyde de carbone atmosphérique, nos basses concentrations à la surface de l’océan indiquent que l’Atlantique Sud pourrait être un réservoir inattendu de gaz à effet de serre. »

« Tout au long du transect du Cap à Dakar, les concentrations moyennes de dioxyde de carbone étaient au-dessous de 400 ppm avec un minimum enregistré à 392,6 ppm. De la même manière, les concentrations moyennes de méthane étaient inférieures à 1,78 ppm avec des minimum observés à 1,7. A titre de comparaison, les concentrations atmosphériques moyennes à l’échelle globale de dioxyde de carbone et de méthane sont respectivement d’environ 410 ppm et 1,85 ppm », explique le Prof McGinnis.

« Les analyses préliminaires de ces nouvelles données ne montrent même pas non plus les fluctuations diurnes des concentrations de CO2 liées à la croissance des algues », poursuit-il.

Pour le chercheur de l’Université de Genève, « les données sans précédent collectées par The Ocean Mapping Expedition soulignent combien il est urgent de pousser plus loin les observations de manière à mieux déterminer le processus dictant le rôle de réservoir ou d’émetteur de l’Atlantique Sud en ce qui concerne ces gaz à effet de serre, voire de tous les océans du globe. »

Des observations similaires au-dessus de l’océan indien en 2018

En juin 2018, au terme de sa traversée de l’océan Indien de Jakarta à Maputo, The Ocean Mapping Expedition avait en effet révélé pour la première fois que cet océan s’avérait un réservoir inattendu de méthane.

« Pour la première fois au monde, nous avons été en mesure d’observer et de quantifier les concentrations de méthane et de dioxyde de carbone à la surface des océans », rappelle le Prof McGinnis.

« Ces premières données sans précédent ont notamment montré que l’océan Indien continuait d’être un important réservoir de CO2 », ajoute-t-il.

« Plus surprenant, cependant, elle ont révélé que l’océan Indien pourrait s’avérer un réservoir inattendu de méthane atmosphérique. En règle générale, explique le chercheur suisse d’origine américaine, on considère que pratiquement tous les océans et les étendues d’eau douce terrestres sont des sources de méthane. Au-dessus de l’océan Indien, le méthane observé à la surface est en permanence 5-6% plus bas que les concentrations atmosphériques. Bien que des investigations plus approfondies soient nécessaires, il apparaît donc à première vue que l’océan Indien pourrait absorber le méthane de l’atmosphère. »

Dans le cadre du programme The Winds of Change, le voilier de 33 mètres Fleur de Passion - un ancien démineur de la Marine allemande construit en 1941 et converti depuis en ketch - est équipé d’un analyseur de gaz à effet de serre relié à une prise d’air située à 16 mètres au dessus de la surface de la mer sur le mât d’artimon (à l’arrière du bateau) et qui procède automatiquement à des analyses toutes les minutes.

L’urgence de réévaluer le cycle du carbone mondial

Le programme The Winds of Change a l’ambition d’apporter à la communauté scientifique des données de terrain inédites contribuant à une meilleure compréhension du rôle des océans dans la problématique du réchauffement climatique. Au vu de l’évolution préoccupante du climat et de l’acidification des océans qui en découle, il doit permettre de revoir de manière urgente les concepts en vigueur sur le cycle du carbone à l’échelle globale.

« Ces premiers résultats stimulants représentent un énorme pas en avant pour la problématique du réchauffement climatique dans son ensemble. Ils prouvent que notre approche est très efficace pour monitorer les gaz à effet de serre à la surface des océans », s’enthousiasme le scientifique.

« Le programme The Winds of Change offre l’opportunité d’accéder à des informations essentielles sur une très large échelle géographique pour compléter celles disponibles par satellites jusqu’à présent, à un moment où la communauté scientifique mondiale s’alarme précisément du manque de données sur cette question », ajoute-t-il.

Comme il l’explique, « Le changement climatique est l’un des plus grands défis auxquels notre époque fait face et sa compréhension constitue un enjeu majeur pour la communauté scientifique. Pour qu’on puisse espérer inverser la tendance efficacement, les scientifiques ont besoin de disposer d’une vision globale et précise des concentrations de gaz à effet de serre à la surface des océans et d’être en mesure de mieux comprendre leur rôle non seulement en tant que réservoirs de tels gaz, mais aussi en tant qu’émetteurs, de source d’émission. »

« Or les océans émettent plus de gaz a effet de serre que préalablement estimé, selon le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), insiste le Prof McGinnis. Il est donc urgent de réévaluer le rôle des océans dans le cycle du carbone mondial pour une meilleure compréhension des questions de réchauffement climatique. »

Lisez l’intégralité du communiqué de presse en français et anglais et, pour les média, téléchargez le matériel libre de droit sur: http://omexpedition.ch/index.php/fr/escale-a-dakar

C’est aussi cela, The Ocean Mapping Expedition: un coup de projecteur sur des acteurs locaux de la société civile engagés comme la Fondation Pacifique dans des actions au profit du bien commun. Profitant de l’escale au Cap et pendant quelques jours de la présence de Pascal Hagmann, directeur d’Oceaneye et responsable du programme Micromegas sur la pollution micro-plastique, l’expédition a ainsi organisé plusieurs réunions informelles avec des organisations locales pour échanger connaissances et expérience sur la problématique de la pollution plastique.

Parmi ces ONG locales, BOAZ, dont le voilier amarré à côté de l’aquarium du Cap n’avait pas échappé à l’équipage de Fleur de Passion. BOAZ est une association dédiée à l'éducation environnementale et à la sensibilisation de la population sur le problème de la pollution marine par les plastiques. Emmenée par une équipe dynamique, elle mène des campagnes d’échantillonnage d’eau de surface en utilisant un « manta trawl » très similaire à celui du programme Micromégas. Le résultat de ces collecte donne lieu à photographies à des fins de sensibilisation. L’objectif à court termes est d’organiser des expéditions et campagnes d’échantillonnage plus lointaines,du Cap à Madagascar et à l’île Maurice, et potentiellement de se doter des moyens d’analyse dans une perspective plus scientifique.

Autant dire que l’histoire et l’expérience d’Oceaneye, qui vient de se doter de son propre laboratoire d’analyse à Genève après avoir pendant longtemps mené ses propres expéditions, et les modalités de partenariat avec la Fondation Pacifique dans le cadre de l’expédition autour du monde, étaient du plus grand intérêt pour Keith, Chris, Andy ou encore Melissa, lors de l’échange mené sur le pont de Fleur de Passion puis autour de la grande table du carré, en 14 janvier 2019.

Comment organisons-nous des prélèvements à bord? Quelles méthodes utilisons-nous pour échantillonner les micro-plastiques? Comment Oceaneye a-t-il été fondé? Et comment faire appel à des sponsors pour ce type de recherche? Telles étaient quelques-unes des nombreuses questions qui ont fusé et nourri un échange aussi passionné que convivial et complice.

Ce jour-là, la réunion à bord de Fleur de Passion comptait aussi des gens de Cape RADD, une autre initiative locale dédiée à la formation en biologie et en conservation marine. Et de cette réunion sont sorties de nouvelles idées, des collaborations possibles et surtout beaucoup de motivation réciproque pour poursuivre le travail de recherche, de connaissance et d’éducation sur la contamination des micro-plastiques dans les océans.

Même climat de grande complicité et d’émulation réciproque quelques jours plus tard quand l’équipe de Sea The Bigger Picture est venue à bord. L’ambition de ce groupe tout droit issu de la société civil est, via les actions de sensibilisation et d’éducation, de concourir à débarrasser les côtes d’Afrique du Sud des déchets plastiques dont elles sont trop souvent et dramatiquement jonchées. Là encore, l’échange a essentiellement consisté en une présentation des actions respectives, en un échange d’expérience, et surtout en un formidable et profondément stimulant moment d’émulation réciproque.

Et que dire encore de notre rencontre avec Hayley McLellan du Two Oceans Aquarium, responsable du programme de sensibilisation sur la thématique de la pollution plastique! Une figure marquante, inspirante comme rarement.

A chaque fois au moment de se quitter, l’émotion était palpable de part et d’autre, comme si le fait de ses rencontrer entre personnes partageant la même sensibilité et le même sens de l’engagement, par-delà les continents, était la plus belle des motivations. Bon vent à tous!

Pour en savoir plus sur ces ONG du Cap:

https://www.yachtboaz.co.za / https://www.facebook.com/yachtboaz/

https://www.caperadd.com

seathebiggerpicture.org / https://www.facebook.com/STBPOceanInitiative/

Depuis Le Cap, on n’est « guère » qu’à 4500 km du 6e continent, et la ville sud-africaine est en conséquence d’un des points de départ privilégié des expéditions scientifiques qui s’y rendent en mission. C’est ainsi que vendredi 18 janvier 2019, Fleur de Passion a accueilli à son bord une équipe de chercheurs belges de la Fondation Polaire internationale, en partance pour l’Antarctique le soir même et curieux de visiter le bateau et faire connaissance avec The Ocean Mapping Expedition. Sans surprise, les échanges entre gens du grand froid et gens de la mer ont tourné sur les thèmes scientifiques et énergétiques de la base Princesse Elisabeth (aussi surnommée zéro émission) et de l’expédition, en particulier le programme de monitoring des gaz à effet de serre en partenariat avec l’Université de Genève. Beaucoup de complicité entre les deux équipes, et une certaine émotion au moment de se souhaiter « bon vent-bon froid ». Bonne mission à vous!